lundi 8 avril 2013

Ma culotte est toute humide

Son départ a été très rapide. A peine quelques mails d’échangés.

Assez courts, qui résumaient bien la situation du moment : « je suis débordé. Peut-être à plus tard ».

 

Elle est partie un mardi soir.

Vers 22h30.

 

Son dernier mail était assez flou et n’indiquait pas vraiment si elle attendait ou non que je lui fasse la surprise de la rejoindre une fois à l’aéroport. Elle me confiera plus tard qu’elle n’attendait que ça, qu’elle a scruté partout tout le temps, pour voir si elle me reconnaîtrait quelque part.

 

Et moi, l’aurais-je reconnu ?

A laquelle de ses 4 photos ressemblerait-elle le plus ?

 

Je n’avais de toute façon pas l’intention d’y aller. A quoi bon… Se rencontrer la veille d’un long voyage… Quel intérêt… Et puis, elle reviendrait vite.

 

Elle m’a appelé le lendemain.

Sur son heure de déjeuner. Une longue heure à roucouler au téléphone.

 

C’était une joie pour moi de l’entendre, et elle me permettait de plus facilement passer le temps.

 

Dans mon boulot, ce n’était pas la joie, étant mis au placard, et vivant intensément mes dernières heures dans cette société, à grand renforts de surf sur la toile et de longs mails dans lesquels je décrivais mon désarroi. Elle était mon rayon de soleil à chaque fois que j’entendais sa voix à consonance latine au téléphone.

 

Et visiblement c’était réciproque.

« Quel sort m’as-tu jeté pour que je sois dans cet état rien qu’en entendant ta voix… »

Quel sort m’avait-elle jeté pour que je sois si heureux de l’entendre ?

 

Ces questions ont perdurés, durant la totalité de notre relation.

On ne savait pas, ce qui faisait que quelque chose était là, si fort, au quotidien.

 

Et puis j’ai découvert une nouvelle facette, peut-être un peu plus coquine chez elle, en recevant cet email : « Suite à notre heure de discussion passé au téléphone… ma petite culotte est toute humide… Je file en réunion. T’embrasse ».

 

Dur, dur de rester zen et concentré avec des clichés dans ce genre…

 

Elle m’appelait, régulièrement.

Elle me décrivait son pays.

Son boulot.

Son étrange mal de gorge qui ne s’arrangeait pas de jour en jour.

Son match de Polo, durant lequel, entre 2 parties, les gens du public devaient venir piétiner le terrain. En long talon aiguilles, elle adorait…

Souvent, elle me rappelait qu’elle était là-bas uniquement pour le boulot, et que même si elle était contente de revenir aux sources, elle était surtout là pour travailler, que c’était une chance pour elle, de revenir au pays que lui avait accordé son ex.

 

Ex, qui avait fini par la rejoindre, quelques jours plus tard.

C’est à cette occasion (et surtout lié au fait que je lui demandais sans cesse de nouvelles photos) qu’elle m’a envoyé une nouvelle photo d’elle, en maillot de bain.

 

Photo assez différente des autres.

Elle ne ressemblait d’ailleurs à aucune de ses 4 premières photos de Meetic.

 

Sur cette photo-ci, elle était juste magnifique.

 

Une longue chevelure brune, un visage marqué par son origine, de longues mains, une poitrine généreuse, et une taille un peu plus large qu’un mannequin, mais qui lui donnait beaucoup de charme.

 

« C’est étrange qu’elle t’envoie une photo d’elle en maillot de bain… non ? » m’ont soufflé beaucoup d’amies, peut-être jalouses de sa plastique assez époustouflante.

 

Peut-être. Mais ce n’est pas cela qui m’étonnait le plus, c’était surtout l’incroyable décalage avec les autres photos…

 

Les jours passaient. Elle était maintenant avec son ex, qui était venu pour se reposer quelques jours sous le soleil, mais aussi pour voir les grands parents de Veronica, avec lesquels il entretenait d’excellents rapports, tant marketing que relationnels.

 

Elle me racontait ses journées à la plage. Et insistait sur le fait qu’il ne se passait rien avec son ex.

 

Elle mentait. Pour me protéger…

 

Avec le recul, je crois que malgré cette rupture, et le fait qu’elle essayait de passer à autre chose, dans sa tête elle était restée son jouet. Et en insistant, il arrivait à obtenir tout ce qu’il voulait d’elle.

 

« Veronica a besoin de prendre du recul sur notre couple » avait-il annoncé à son grand-père, pour expliquer leur cassure. Elle avait failli s’étouffer avec son verre de vin lorsqu’elle avait appris la raison « officielle » de cette rupture.

Une rupture qui était présentée comme peu sérieuse, comme temporelle. Comme une crise d’ado.

 

Une rupture qui l’infantilisait encore plus…

 

Mais elle continuait malgré tout à m’envoyer des photos d’elle.

 

3 photos, sûrement prises durant la journée Polo, sur lesquelles elle posait sagement devant son ordinateur. Toute de bleue vêtue.

Puis 2 autres photos d’elle, plus jeune, qu’elle avait promis qu’elle m’enverrait dès lors qu’elle retournerait dans la maison de son enfance.

 

Ses mails transpiraient l’émotion lorsqu’elle me parlait de la maison de son enfance, maison qui avait quasiment été abandonnée à la mort de ses parents. Elle s’isolait de longues heures là-bas, en redécouvrant son passé, son terrible passé. Sa voix tremblait lorsqu’elle me racontait au téléphone avoir découvert des lettres d’amour que ses parents s’étaient envoyé, témoignage intemporel d’un amour éternel.

 

A Paris, il neigeait.

Ma mission se terminait, et j’étais sur le point de faire face à de longues journées d’inter contrat, désagréable période durant laquelle il faut faire acte de présence au boulot, où tous les déjeuners sont en tête à tête avec mon patron, électron libre dans un monde dans lequel il était à 100 000 lieues.

 

Chaque journée était une journée potentielle durant laquelle j’aurais pu passer un entretien. Dans le froid, dans la neige parisienne qui se renouvelait tous les jours.

Alors chaque long coup de fil qu’elle me donnait, (toujours en restant en numéro masqué) était une bouffée d’oxygène.

 

Elle était toujours là, allant jusqu’à me passer un rapide coup de fil avant un match important dans mon championnat, juste quelques mots « je suis de tout cœur avec toi… sois fort… je pense à toi ».

 

Omniprésente.

 

Noël est arrivé très vite. J’aurais pu envisager de prendre quelques jours, mais pour aller où ? Pour faire quoi ? Avec un solde de congés proche de zéro… De plus cela ne collait pas avec la politique de mon boss qui espérait toujours que je puisse décrocher une mission entre le 21 décembre et le 3 janvier.

 

J’essayais durant chacun de mes coups de fil de glisser la fameuse question « et sinon, quand penses-tu revenir ? Est-ce qu’on passera le premier de l’an ensemble ? »

 

Sa réponse était à chaque fois très évasive.

Elle m’appelait tous les jours aux alentours de 11h, l’heure à laquelle elle se réveillait chez elle (6h donc…) 

 

Le jour du réveillon est arrivé. Je suis retourné dans ma famille pour fêter mon dernier Noël avec mon père, qui serait placé dans un centre spécialisé pour Alzheimer quelques jours plus tard. Ce Noël avait quelque chose de… morose. D’ultime.

 

« Je t’ai préparé un petit cadeau » m’avait-elle soufflé au téléphone. « Va voir tes mails… »

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