lundi 15 avril 2013

SMS

La magie de notre relation, la magie du désespoir, la magie de la distance, peut-être même également la magie de Noël, j’ai fini par accepter ses excuses. Et nous sommes repartis de plus belle.

 

-       Comment fais-tu pour être si gentil… me disait-elle sans cesse.

 

« Tu es trop bon avec un c », me disait-on également … Je crois que je croyais plus en cette seconde définition du moment.

 

Cependant, son retour en France commençait à se planifier. Quelque part aux alentours du 12 janvier, peu de temps après la fête de l’anniversaire de sa grand-mère.

Cependant, elle était assez bizarre, et même si elle ne le disait pas ouvertement, elle mangeait de moins en moins.

Un problème de mal de gorge qui l’empêchait d’avaler la moindre gorgée. Mais elle ne semblait pas y prêter la moindre importance.

 

Une fatigue croissante également, qu’elle mettait sur le compte du contrecoup de sa cassure, en quelque sorte, une fatigue normale, nécessitant une récupération réparatrice pour être de nouveau en bonne forme.

Elle devait atterrir un mercredi. J’avais de mon côté quasiment réserver mon week-end pour le passer à ses côtés.

 

Et puis j’ai reçu ce SMS.

Le premier SMS depuis 2 mois, l’obligeant ainsi à me laisser pour la première fois un numéro de téléphone au bout duquel je pourrais la joindre…

Elle ne serait plus la seule à pouvoir me joindre, à mon tour j’aurais la possibilité de l’appeler, quand j’en aurais envie… (En d’autres termes, en dehors des heures de boulot…)

 

« J’ai eu un petit malaise, je suis aux urgences. Tout va bien ne t’en fais pas. V »

 

Le mot « malaise », « urgences » et « tout va bien » dans une même phrase ne collent pas vraiment.

J’ai mis du temps à accepter la vérité, sa version des faits, son « cadeau » de Noël n’aidant pas…

 

Une mononucléose.

 

« La maladie du baiser » que la plupart des personnes attrapent en étant ado.

A un stade néanmoins relativement avancé. Le foie était atteint.

Un ami docteur m’a confirmé que c’était plus délicat à gérer, une fois adulte…

 

Cela expliquant cependant le mal de gorge aggravé d’une part… mais aussi la fatigue récurrente.

 

Cela pouvait également expliquer une raison supplémentaire pour ne pas revenir en France. Une première fuite. Pour ne pas se montrer.

Peut-être aussi pour cacher quelque chose ? Mais pour cacher quoi ?

Une histoire improbable, sortie de l’imagination d’une nana en mal d’amour, désirant s’inventer une vie ?

Un physique inventé ?


 

Quels mystères cachait-elle ?

 

Et puis j’ai fini par me résigner. A grand coup de questions en mode inquisiteur…

Ses symptômes semblaient bien correspondre m’a confirmé un ami médecin.

« Effectivement ça correspond bien » m’a confirmé ma sœur.

« En tout cas Wikipedia confirme les symptômes qu’elle te donne.»

 

Ma sœur n’a jamais cru en l’histoire de Veronica. Elle voulait pourtant y croire, mais elle soupçonnait Veronica d’avoir de multiples mensonges sous le coude, qu’elle était prête à dégainer à tout moment. Même si je sais que sincèrement, elle voulait que Veronica existe bel et bien…  

 

Veronica m’appelait quand elle le pouvait. M’expliquant qu’elle faisait tous les jours des prises de sang, et qu’elle avait un traitement pour que ça aille mieux. Elle avait également droit à de l’injection de vitamines en intraveineuses…

 

« Oui… Depuis la mort de mes parents j’ai un rapport assez étrange avec la nourriture… Quand ça ne va pas je me fais vomir… et là, ces derniers temps, ça n’allait pas fort… »

 

Une casserole de plus à trainer.

Elle commençait à faire pas mal de bruit en marchant…

 

Chaque jour elle pensait que ça allait mieux, et chaque jour les médecins lui affirmaient le contraire. Comme quoi le traitement ne marchait pas.

Elle a néanmoins fini par sortir 2 semaines plus tard.

 

La mononucléose, qui contrairement aux idées reçues ne s’attrape pas uniquement durant l’adolescence mais peut aussi se contracter via des aérosols, a ce gros inconvénient d’épuiser physiquement une personne. Surtout adulte.

« Il faut que je me repose » me répétait-elle sans cesse.

Nouvel argument pour ne pas revenir, nouvelle « fuite en avant ».

 

Repose-toi. Soit.

Mais pas trop longtemps quand même…

 

Alors que là-bas, l’été battait son plein, en France l’hiver se retirait petit à petit. Je finis par retrouver une mission à la mi-janvier.

 

Un début de mission est toujours un moment particulièrement stressant. Convaincre des interlocuteurs une heure durant que vous êtes le candidat idéal, reste la partie la plus facile et la plus agréable. Un peu comme de mesurer la partie « émergeante » d’un iceberg en quelque sorte.

Ensuite, il y a la phase de tests. La première ligne droite, avec le tournant qui arrive très rapidement en bout de ligne droite.

C’est le moment durant lequel, il faut commencer à aller sous l’eau, pour mesurer l’iceberg dans sa totalité.

 

J’ai pourtant donné le meilleur de moi-même.

Mais mes journées étaient parsemées de longues heures au téléphone avec Veronica Tantôt à roucouler, tantôt à l’inquisition.

Tantôt à s’engueuler. Tantôt à l’entendre pleurer.

Tantôt à lui susurrer des mots doux, tantôt des scénarios sexuels, plus qu’érotiques qui (me confiait-elle honteuse) la mettait dans tous ses états.

Le plus compliqué pour moi étant de trouver un endroit discret dans lequel je pouvais m’adonner à elle.

Mon travail était devenu secondaire.

 

Parfois, lorsque je l’appelais, elle ne me répondait pas.

Parfois, cela était volontaire. D’autres fois ça ne l’était pas.

 

Je crois qu’elle ne savait pas vraiment si j’étais trop collant ou non.

 

Elle n’aimait pas taper des SMS, et du coup répondait rarement aux miens.

Par contre, elle aimait que je lui écrive des longs mails dans lesquels je lui déclarais ma flamme. Ou dans lesquels je lui racontais ma journée.

 

Lorsque je lui expliquais que je ne pouvais rester plus longtemps au téléphone, ou que j’allais déjeuner avec mes collègues (afin d’intégrer la nouvelle équipe), elle comprenait, non sans bien me souffler à l’oreille l’idée comme quoi que je devais gérer mes priorités…

Elle (au téléphone), la « future femme de sa vie », comme elle se définissait, ou mon énorme estomac à rassasier à toute heure.

 

Un vrai échange mono-latéral réciproque.

 

Infatigable, impassiblement, chaque jour, lorsque je lui posais mon éternelle question « tu reviens quand ? »

Chaque jour, elle m’envoyait paître.

Toujours en mode défensive.

Avec toujours cette même réponse : « Je dois me reposer tu comprends ? »

 

Oui, ça je le comprenais.

Je ne le comprenais que trop.

 

Par contre, je comprenais assez mal toutes les sorties nocturnes qu’elle faisait avec ses amis. Sortie rimant avec guitare au coin du feu, alcool, shit… et rythme de vie bien évidemment totalement décalé.

 

Elle fuyait.

Indéniablement, elle fuyait son retour en France.

Elle me fuyait moi.

Elle fuyait d’affronter la réalité.

La nouvelle vie sans son ex qu’elle devrait s’inventer… 

Le passé qu’elle devrait essayer d’oublier.

Sa belle-famille qu’elle devrait cesser de voir, incluant ses enfants, qu’elle avait élevé 10 ans durant.

Son ex, qui était tout pour elle depuis 10 ans.

Son indépendance totale à sa boite, à son ex.

Repartir à zéro, sans repère à 30 ans, cela peut rapidement s’avérer compliqué.

 

Surtout lorsque l’on avance en marche arrière.

 
Indéniablement… Elle fuyait.

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